Le Clea organise "6 heures pour nos libertés", un meeting traitant des menaces
que fait peser sur nos libertés la lutte contre le terrorisme, ce samedi à la
Salle Dupréel.
Toutes les infos sont disponibles sur le site http://www.leclea.be.
Ci-dessous, vous trouverez le texte de Bahar Kimyongur, dont le procès en
appel débute à Gand lundi prochain et qui risque plusieurs années de prison
pour avoir utilisé ses droits à l'expression et à l'organisation, vous
conviant à cette activité. Diffusez cette appel à toutes vos connaissances.
--
"Pour que « Scientia vincere tenebras », retrouvons-nous samedi 9 septembre
2006 à l'ULB
Loin de nos frontières, les bombes pleuvent sur les têtes. Chez nous, elles
pleuvent dans les têtes. En Palestine, au Liban, en Irak en Afghanistan,
elles fauchent les vies ; ici, elles nous arrachent la raison et nous
mutilent notre organe le plus précieux : la conscience.
Celles qui assassinent vieillards et enfants, sont incendiaires, à
fragmentation, au phosphore ou au napalm. Celles qui assassinent nos esprits
sont faites d'images, d'encre et d'ondes sonores.
Les armes de destruction massives qui s'abattent sur les innocents des
contrées lointaines relèvent d'une technologie élaborée. Celles qui
conditionnent nos opinions et nos sentiments ici-bas, ont un mécanisme
rudimentaire qui s'actionne par un simple et ô combien redoutable mot
magique: TERRORISME.
A la radio ou dans les gazettes, à la télé ou au ciné, à table ou à jeun, dans
notre peignoir ou dans notre jean, au travail ou en vacances, à la gare ou au
bistrot, en gastronomie raffinée ou en fast-food, avec ou sans sucre, où que
l'on soit et quoique l'on fasse, sa moindre évocation génère une angoisse,
voire une véritable psychose qui permet sournoisement aux institutions
répressives de jouir de compétences toujours plus étendues et de faire taire
les pensées les plus insoumises.
Autant effroyable de par son signifié que de par son signifiant, ce mot a,
depuis peu, envahi les codes juridiques, les bancs des tribunaux et jusqu'à
l'âme même des hommes de loi.
C'est ainsi que le 28 février dernier, la justice de ce pays où j'ouvris les
yeux par un jour radieux d'avril, a fait de moi un démon, pour avoir
simplement défendu, par le verbe et le coeur, des femmes et des hommes épris
de liberté, qui, de s'être levés contre la tyrannie et l'infamie
ensanglantant les terres généreuses et fraternelles d'Anatolie, ont perdu la
vie, la liberté ou la santé.
J'ai ainsi été frappé d'un « triangle rouge » pour avoir aimé des
indésirables, des damnés irréductibles, des inconnus souffrant
silencieusement dans des camps qui ont été récemment modernisés afin qu'ils y
meurent plus proprement.
Mais nous qui vivons loin de ces marais sinistres, ne sommes-nous pas
également internés dans ces mêmes camps de par l'esprit ?
La guerre. Là-bas, physique. Ici, mentale.
Une guerre, à la fois réelle et virtuelle, dont nous souffrons tous, car elle
a érigé des murs entre nos langages, nos sentiments, nos émotions et nos
rêves. Elle a semé l'incompréhension parmi nous.
La captivité. Là-bas, physique. Ici, mentale.
La guerre, nous ne pourrons sans doute la vaincre sans avoir définitivement
éliminé l'exploitation et la cupidité. En revanche, les forteresses mentales
de la guerre sont assurément à la portée de qui est prêt à en gravir les
murailles, à travers la réflexion et la critique.
Fort heureusement, des esprits libres et courageux qui se sont fédérés au sein
du Comité pour la liberté d'expression et d'association (CLEA) ont fait la
démarche de les franchir.
En organisant un meeting ce samedi 9 septembre, soit deux jours avant mon
procès en appel, ils m'offrent une occasion unique et ultime pour susciter le
débat et faire connaître la cause de ceux pour qui je me bats depuis 10 ans.
Aussi, je convie toutes les personnes avides de vérité plurielle, à se joindre
à cette rencontre exceptionnelle qui aura notamment le mérite de réunir de
multiples voix dissonantes et dissidentes issues du monde académique,
politique, littéraire, social, artistique et syndical
Cette rencontre aura lieu dans l'un de nos incontournables temples du Savoir,
nommément l'Université libre de Bruxelles (ULB), en la salle Dupréel et
débutera à partir de 15h30.
D'avance, je vous remercie cordialement pour votre intérêt et espère vous voir
nombreux parmi nous.
Scientia vincere tenebras.
Bahar Kimyongür"